mardi 13 juillet 2010

(untitled) : avis



J'avais déjà parlé de ce parfum -sans le connaître réellement- dans un article datant de mars où j'exposais mes attentes et mes appréhensions concernant (untitled). Je l'ai néanmoins senti peu après mais j'ai préféré attendre avant de donner mon avis.


Il faut bien l'avouer, ma première impression a été plus que détestable. Je trouvais la fragrance bancale, et pour tout dire pas agréable du tout. Les notes de tête étaient, je trouve, lourdes et écoeurantes. J'avais l'impression que deux tourbillons parfumés, le premier, vert, s'en allant en se rétrécissant avec le temps, et le second aux accents balsamiques qui s'en allait grandissant essayaient tant bien que mal de s'encastrer sans jamais se mêler l'un à l'autre et sans grande cohérence. Deux tourbillons que tout opposaient en fait coexistant dans une sorte de cacophonie olfactive pas des plus agréables. J'ai beau l'avoir essayé et réessayé plusieurs fois, rien à faire, toujours cette même répulsion.


Par contre, il y a peu, j'ai reçu en échantillon par la poste, ce qui m'a laissé tout le loisir de le tester chez moi au calme. Et j'ai pu le redécouvrir. Disons que maintenant, j'ai un avis un peu moins négatif, mais je ne peux m'empêcher de trouver que la publicité du parfum (tordante, par ailleurs) a fait part de mégalomanie assez excessive par rapport au jus qui nous est ici proposé.


Tout d'abord, on a un souffle de galbanum assez puissant, qui, par chance, évite de tomber dans le âcre comme Y de Yves Saint Laurent semble parfois le faire. Ce galbanum est accompagné de lentisque, note qu'on retrouve dans la tête de Habanita. Cette tête me fait énormément penser à l'odeur du buis fraîchement coupé au printemps, un odeur verte assez particulière. Ensuite vient un fleur d'oranger qui vient adoucir la composition en lui donnant un aspect plus doux, cotonneux mais limite médicinal. Comme souvent, une touche d'iris vient marquer la transition entre notes de coeur et notes de fond, cet iris étant, je trouve, assez terreux. Puis après, c'est une sorte de débauche de muscs, de résines -benjoin et encens en tête- et de santal qui vient apporter cette facette blanche, balsamique que l'on trouve dans ce parfum.
Pas des plus désagréables, mais ce n'est pas du « jamais-senti en parfumerie » non plus. Je le vois plutôt comme un version « modernisée » de Chanel No 19 (bien que ce dernier n'ait pas besoin d'être modernisé de quelque façon que ce soit, loin de là). Certes, on peut considérer qu'il y a rupture dans le sens où les parfums verts ne sont pas spécialement répandus côté lancements ces dernières années (exception faite de A Scent) et qu'on a souvent à faire à des jus de fruits assez insipides. Alors, oui, (untitled) sort un peu du lot parmi ces lancements. Mais après, on est pas non plus dans la super innovation non plus puisque la fragrance reprend des thèmes olfactifs déjà très usités : il suffit de sentir, au choix, le No 19 ou Y pour se rendre compte que c'était pour ces fragrances, et pas pour (untitled) que la rupture a eu lieu.


Et puis, en parlant de déjà-senti, je ne suis pas la seule à remarquer qu'il y a une parenté plus qu'ambiguë entre certains parfums Prada et ce Margiela. Et pour cause, puisque c'est le même nez, Daniela Andrieux, qui se cache derrière (untitled) et les parfums Infusion d'Iris et L'Eau Ambrée. Si on pressent une parenté entre Infusion d'Iris et (untitled) à cause des notes « vintage » d'iris, de benjoin et de fleur d'oranger employées par la créatrice, on a carrément l'impression de plagiat olfactif lorsqu'on compare la fragrance Margiela avec L'Eau Ambrée. Sérieusement, les notes de coeur sont exactement pareilles. Je n'avais pas senti L'Eau Ambrée avant disons, il y a une semaine, mais je voyais bien la parenté entre l'Infusion et (untitled). Maintenant que j'ai senti cette eau, la ressemblance saute aux yeux (enfin, au nez). Donc côté originalité, on repassera.


Personnellement, je pense qu'il aurait été beaucoup plus judicieux de créer un parfum tournant autour du patchouli pour une première fragrance Martin Margiela puisqu'il s'agit de la signature olfactive de la maison, et ce bien avant qu'il soit question de créer un parfum à leur nom. (d'ailleurs, en parlant de la maison, je suis vraiment contente pour eux parce qu'après une période de creux suivant le départ du maître, elle semble avoir repris du poil de la bête et livre un collection automne-hiver assez intéressante : pourvu que ça dure !)


Un détail intéressant, c'est que je trouve qu'il y a une note de plâtre frais, très Margielienne justement, dans la composition qui vient donner un côté un peu décalé à l'ensemble. Si je devais retranscrire visuellement le parfum, je dirais : le château de Versailles relooké façon Margiela sous la pluie. C'est-à-dire recouvert intégralement d'un drap en coton blanc, avec simplement un chiffre dans un cercle imprimé dans un coin. Il faudrait imaginer le sol et les murs recouverts d'enduit frais blanc, avec du plâtre plein les escaliers. Et dehors, une pluie viendrait s'abattre sur les graviers, les oranger en fleurs dans leurs bacs et les jardins à la française bordés de buis et chargés d'iris en fleurs.


C'est un peu tout cela que m'évoque (untitled) : malgré leur volonté de faire un parfum neutre, sans évocation olfactive, les codes de la maison finissent par emprisonner la parfum dans son propre univers : au lieu de ne rien évoquer, il finit par évoquer Maison Martin Margiela elle-même.

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